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6 mars 2010 6 06 /03 /mars /2010 12:04
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pont de normandie gross 20050615143034




Il a fallu attendre avril 2008, soit après les élections municipales, pour qu’il soit rendu public et... septembre 2009 pour que le texte de ce rapport soit enfin accessible sur le site Internet du conseil régional de Haute-Normandie : de quoi a-t-on peur ?
[1]

 

Entichés de ce « principe de précaution » dignes de toutes les politiques de « Gribouille » [2], certains responsables politiques continuent de s’opposer à l’idée de « réunification » normande, idée incantatoire selon eux,  de ceux qui n’auraient aucune idée, paraissant telle une vieille arlésienne, la veille de chaque élection régionale. « Faiseux plus que diseux », ils préfèrent plutôt mettre en valeur le bilan bien réel de projets menés tant bien que mal dans le cadre des deux régions administratives actuelles : c’est le discours confortable du décideur politique gestionnaire satisfait d’un bilan sans aucun doute satisfaisant mais qui remet sine die le moment difficile de choix politiques décisifs.[3]

 

Mais face aux lourds enjeux du déclin normand et du « Grand Paris », les deux petites cours de récréation normandes bruissantes de leurs enfantillages politiciens pourraient paraître bien mesquines ! Il ne faudrait pas que des « faiseux » sans imagination ne deviennent « fâcheux » pour l’avenir : avec l’opération du « Grand Paris », L’Elysée a sifflé la fin de la récréation d’une Normandie sans imagination divisée en deux  et le maître du Havre s’impatiente...

 

Le coup de sifflet, Alain Le Vern, président sortant du conseil régional de Haute-Normandie et son co-listier Marc-Antoine Jamet, tous deux en campagne pour les prochaines élections régionales, feignent de ne point l’entendre : tous deux socialistes, ils affirment que la « région » (sans nous dire laquelle) doit « défendre les Haut-normands contre les hauts revenus » dans un contexte social économique difficile et face


[1] Le texte du rapport du cabinet INEUM consulting EDATER a fait l’objet d’une synthèse résumée et commentée de 29 pages par Jean-François BRISSET, du collectif citoyen et républicain « Bienvenue en Normandie » : cette synthèse est disponible sur le site du webzine « Etoile de Normandie » (normandie.canalblog.com).

Au cours du printemps 2009, à défaut d’un véritable débat public ou d’une véritable réception publique (comme pourtant organisée en région Basse-Normandie) le rapport EDATER fit l’objet d’une discrète réflexion de la part des services du Conseil Régional de Haute Normandie. Citation édifiante des conclusions de la « commission d’information et d’évaluation sur les limites administratives de la Haute-Normandie » (sic !) à propos des conclusions du rapport EDATER concernant la fiscalité locale : « la comparaison en euros par habitant montre dans chaque cas que l’union des deux régions aboutit à une région moins puissante que la seule région Haut-Normande, conséquence d’une disparité de richesse entre ces régions.(...) L’union des deux Régions nécessiterait une harmonisation qui aboutirait, techniquement, à une majoration de la fiscalité pour les contribuables Haut-Normands » ( Réunion du 1er avril 2009) ... ça ne s’invente pas ! La mauvaise foi consiste donc à confondre les enjeux globaux d’une fusion territoriale et les contraintes techniques d’une fusion administrative : à croire qu’un conseil régional en bonne santé importe plus que le dynamisme global d’un vrai territoire...

[2] Référence au personnage créé par la Comtesse de Ségur dans le roman « La sœur de Gribouille » (1862) dont l’action se déroule à Verneuil sur Avre : Gribouille, dont la sœur est couturière, préfère se jeter dans l’eau d’une rivière pour ne plus avoir à craindre l’eau de pluie sur son nouvel habit.

[3] Lire pour s’en convaincre le billet laissé par Alain Le Vern sur son blog de campagne où la référence à la réunification normande est qualifiée « d’enfumage  UMP». Quand l’analyse politique se dégrade en sornettes politiciennes : le président régional haut-normand sortant se targue, à juste titre, d’un excellent bilan de gestion mais refuse de le mettre dans une perspective normande. Quel gâchis !


à un gouvernement de droite qui détricote le pacte républicain.

 

Certes... Mais  aux citoyens de Haute-Normandie que l’on prend ainsi pour des imbéciles, ces responsables politiques qui se disent de « gauche » n’expliquent rien et surtout refusent de dire  l’essentiel : Une Haute-Normandie haut-normande est le plus sûr moyen de soumettre les salariés d’une « Seine inférieure » aux hauts revenus des Hauts de Seine ! A les entendre, il ne faudrait donc pas parler de Normandie lors d’élections régionales en région administrative de Haute-Normandie : la « réunification » ça n’intéresserait pas des populations surtout préoccupées par un quotidien difficile alors que la perspective de l’unité régionale normande est la condition sine qua non pour envisager un meilleur avenir économique et social !

 

On peut, fort heureusement, faire d’autres choix politiques pour présenter les vrais enjeux de cette élection régionale en Normandie pour ne plus céder aux facilités politiciennes (nationaliser le scrutin au lieu de le régionaliser...) : dans les deux actuelles régions administratives, la droite UMP a décidé de faire de l’avenir même de la Normandie, un enjeu du scrutin.

Le 14 janvier dernier les têtes de liste UMP en Normandie (Jean-François Legrand en Basse et Bruno Lemaire en Haute) se sont rencontrées à Honfleur. Il en est de même pour la liste PS-PRG-PCF emmenée par Laurent Beauvais, président sortant en région Basse-Normandie...  Tandis que les têtes de listes Europe -Ecologie en Haute et Basse Normandie et Ile de France se sont retrouvées, à Rouen le 11 février dernier, pour une stimulante réflexion liant la question de la fusion régionale normande à celle du Grand Paris et à la question plus sensible encore de l’actuelle réforme des collectivités territoriales[1].

 

Que l’urgence de faire l’unité régionale normande pour défendre un intérêt général normand ne fasse toujours pas l’objet d’un véritable consensus  républicain est en soi regrettable ! Mais ce qui est proprement consternant c’est que ce consensus ne puisse pas exister entre les deux présidents régionaux socialistes sortants, si l’on considère que les forces politiques de gauche ont tout à gagner à faire ce que la droite


[1] Participaient à cette rencontre : Claude Taleb, tête de liste Europe Ecologie en Haute-Normandie, Yannick Soubien représentant la liste Europe Ecologie en Basse-Normandie et Cécile Duflot, tête de liste Europe Ecologie en Ile de France. Eclairée par les contributions de trois experts, la réflexion fut d’une grande qualité : un compte rendu exhaustif est en ligne sur le site du webzine  « Etoile de Normandie » (normandie.canalblog.com). Présents à cette réunion, nous avons insisté sur les absurdités de la géographie industrielle subie en Normandie : des milliards déversés pour un voire deux EPR électronucléaires avec leurs THT aériennes et toujours pas de trains entre Rouen et Evreux ou un Paris-Granville qui connaît des difficultés chroniques alors que les grandes lignes « Corail » normandes comptent parmi les plus rentables de la SNCF...

 

régionale normande avait refusé de faire il y a près de quarante ans ! [1]

 

Finalement, le problème principal des derniers opposants à la « réunification » normande est moins de s’y opposer avec des arguments plus ou moins convaincants que de ne rien proposer qui soit enfin à la hauteur des enjeux d’un intérêt régional normand : il faut un saut qualitatif et conceptuel que certains responsables politiques, plus soucieux de leur carrière politique que de l’intérêt général, sont toujours visiblement incapables de faire !

 

Le cas d’Alain Le Vern est pour le moins symptomatique : il aime « sa région » (laquelle ?) confondant ainsi  le territoire et l’institution qui lui a permis de faire carrière avec un bilan de gestion incontestablement positif. Il y aurait donc une « région » sérieuse pour les gens responsables et une « région » pour tous les autres, notamment ceux qui seraient embrumés par les nostalgies historiques d’une ancienne province ducale[2]...

 

Mais à quoi bon une « bonne » région sur un « mauvais » périmètre territorial ?

 

Une Haute-Normandie haut-normande tout comme une Basse-Normandie bas-normande ignorant leur identité normande commune sont des réalités aussi idiotes qu’un manche sans balai, qu’une valise sans poignée ou qu’un vélo sans sa roue avant ou sa roue arrière !

 

Depuis 40 ans, toutes les tentatives de développer ou de promouvoir de façon autonome les entités néo-régionales « Haut-normande » ou « Bas-normande » se sont traduites par des échecs parfois pathétiques et ont contribué à brouiller l’image de la Normandie,  pourtant dotée du patrimoine naturel, culturel et historique le plus prestigieux et le plus reconnu de toutes les régions françaises  surtout à l’Etranger[3].

Nier, aujourd’hui encore, l’évidence de cette identité régionale normande sans laquelle il ne pourrait pas y avoir les actuelles réalités bas ou haut normandes, c’est prendre le


[1] Hommage à Gustave HEON (1910- 1981) : ancien résistant, sénateur maire de Bernay et président du Conseil Général de l’Eure, ami de Pierre MENDES-FRANCE, il s’était opposé avec la dernière vigueur contre la création en 1972 de deux Etablissements Publics Régionaux en Normandie en organisant la grève des élus de l’Eure au nouveau conseil régional haut-normand.

[2] Il ne faut pas en effet confondre la notion de « région » qui renvoie à une réalité qui serait objective et institutionnelle et la notion de « province » qui renvoie à une réalité qui serait affective et relevant de la culture et de la géohistoire : l’intérêt d’un territoire ne serait-il pas au contraire d’harmoniser au mieux ces deux notions ?

[3] On retiendra le cuisant échec de la candidature solitaire d’une « Lower –Normandy » aux Jeux Equestres mondiaux en 2004. Leçon retenue puisqu’en 2014  les Jeux Equestres mondiaux auront lieu en... Normandie, le projet ayant fait l’objet d’une collaboration étroite entre les deux régions administratives. En décembre 2007, un premier séminaire des professionnels de la communication en Normandie réunis à Deauville constatait avec dérision le brouillage normand entre Haute et Basse : le colloque était annoncé par une affiche présentant une jolie jeune fille blonde qui louchait ! Un oeil vers le Haut et l’autre vers le Bas...

 

risque ridicule de nier une identité régionale ancienne, savante, plus historique que mythologique, plus ouverte sur le monde que repliée sur elle-même, forgée par près de deux siècles de contemplation esthétique et érudite de ce véritable bien public universel normand comme nous l’a démontré l’historien François Guillet : c’est cette « Normandie sensible » que nous propose encore de parcourir le grand géographe français du fait régional Armand Frémont.

C’est la Normandie des peintres; la Normandie des voyageurs et des marins ; la Normandie des écrivains; la Normandie des érudits et des « antiquaires » qui a tant donné à la France au titre des arts, sciences et belles lettres car l’évidence patrimoniale normande, située entre Londres et Paris, a longtemps fasciné les élites... Mais cette « Normandie sensible » c’est aussi la Normandie d’un peuple normand de la grande ou de la petite ville, des bocages, des campagnes ou du littoral qui n’a jamais ressenti le besoin d’affirmer une  identité « identitaire » ou « régionaliste » pour justifier l’évidence de la Normandie, vieille province française : ce n’est que récemment que les élites et les citoyens engagés dans le mouvement social régional ou que les décideurs économiques régionaux s’inquiètent d’un déclin régional normand avec pour conséquence de faire enfin apparaître, dans le débat public,  une « question régionale normande »[1].

 

Cette identité normande a-t-elle vieillie ?  S’est-elle ringardisée à trop obliger à la fréquentation des musées et des bibliothèques ? « Les Vikings sont-ils fatigués ? » [2]

 

Faudrait-il donc obtenir le classement de la Normandie au patrimoine mondial de l’Humanité de l’UNESCO après le succès du grand festival « Normandie Impressionniste 2010 » pour


[1] Lire : François GUILLET, « L’identité normande est une construction », entretien donné à L’Express (21 octobre 2008), pp. 80- 83. A la question sur le récent complexe d’infériorité normand vis-à-vis de la Bretagne, François GUILLET analyse : « Jusque dans les années 1960- 1970, les Normands se considéraient comme bien supérieurs aux Bretons. La Bretagne a longtemps été vue comme une région archaïque et pauvre, dont une partie de la population ne parlait même pas le français... A ses côtés, la Normandie apparaissait comme prospère, moderne, ouverte. Le retournement s’explique sans doute par le lourd tribut payé par la Normandie à la crise économique. Et puis, culturellement, les Bretons se sont appuyés sur leurs particularismes linguistiques. Ils se sont forgés  une identité celtique qui leur a permis de mieux s’en sortir, même s’il s’agit en grande partie d’un fantasme. Aujourd’hui, le tourisme est bien plus développé en Bretagne qu’en Normandie, alors que cette dernière accueillait toute l’aristocratie européenne au XIXe siècle. »

Lire : Armand FREMONT, « Normandie sensible », Editions du cercle d’art (septembre 2009). Promenade sensible dans l’espace vécu d’un géographe véritablement normand qui a fait de la Normandie son « laboratoire ». Une évidence : la Normandie qui aura pu nourrir toute une vie d’expériences professionnelles et personnelles est bien vivante, pour qui sait la rencontrer.

[2] L’identité régionale normande s’affirme aujourd’hui par l’humour et l’autodérision : ainsi le succès de la marque régionale « Heula » créée en 2006 à Caen qui tourne en dérision les clichés qui collent à la peau des Normands.

« Les Vikings sont-ils fatigués ? » s’interroge le géographe rouennais Arnaud BRENNETOT qui analyse lucidement les difficultés institutionnelles, politiques, sociologiques ou géostratégiques d’une fusion régionale normande : le recours à une identité régionale normande patrimoniale n’est pas suffisant, il faut un projet fédérateur ou alors une menace extérieure pour faire de l’unité régionale normande une nécessité politique.

Lire : Arnaud BRENNETOT, « Unir la Normandie ? Raisons et limites d’une ambition », Etudes Normandes, (N° 1, 2010) pp. 27- 40. Numéro spécial reprenant les contributions du site « Normandie2010.org ».


convaincre les derniers récalcitrants de l’intérêt politique d’une seule Normandie ? On peut hélas craindre que cela ne soit pas suffisant : du fait de la division régionale,  toutes les tentatives pour faire de la Normandie un enjeu politique,  en tant que tel, ont échoué. Pour le dire plus crûment, la carrière publique du personnel politique en Normandie, carrière essentiellement locale, s’est montrée incapable de prendre en charge un intérêt général à l’échelle normande, les arrières pensées prenant trop souvent le pas sur la pensée d’un vrai projet politique.[1]

 

Projets pour les réunifications normandes

 

Le temps est venu de passer aux choses sérieuses, à savoir penser une Haute et une Basse Normandie vraiment normandes :

Les deux régions actuelles ne sont que des demi-régions qui se partagent, plutôt mal que bien, un potentiel sinon un trésor communs. La coopération interrégionale normande est donc structurellement insuffisante puisqu’il faut unifier les politiques régionales si l’on veut vraiment stopper le déclin global de la Normandie pour être à la hauteur des enjeux du « Grand Paris » en défendant enfin un intérêt régional normand. [2]

 

La « réunification » ne peut plus être repoussée aux calendes grecques sans compromettre délibérément l’avenir même en Basse ou en Haute Normandie : la « réunification » suppose des projets mais ces projets supposent la ou les « réunifications » normandes !

A suivre...


[1] Lire : Thomas PROCUREUR, Le blocage normand ou la mise à l’agenda de la « réunification normande », mémoire de Master 2, Master « Action et espaces publics en Europe », IEP de Rennes, dir. Romain PASQUIER, septembre 2008. Ce jeune enseignant-chercheur nous propose une étude inédite et passionnante sur l’histoire politique de la division normande depuis les années 1970. Edifiant « blocage » normand de la non prise en charge de l’intérêt général normand par la carrière publique et personnelle : d’Ornano, Lecanuet, Rufenacht, Morin, s’y sont essayés en vain... faute d’enjeux. Mais aujourd’hui, il y a le « Grand Paris » et un Laurent Fabius qui est bien obligé de penser à autre chose pour  2012 !

[2] Lire : Armand FREMONT, « Quelques réponses à des arguments défavorables à l’unification », Etudes Normandes, (N° 1, 2010), pp. 77- 80. Le géographe normand explique pourquoi il est devenu favorable à l’idée d’unité administrative normande en récusant les principaux arguments des opposants à toute fusion entre Haute et Basse Normandie. Citation choisie : « argument : L’extension parisienne vers la Basse- Seine enterre définitivement la Normandie, Le projet d’Antoine Grumbach a relancé un débat récurrent. Rouen et Le Havre, la Basse Seine en général, constituent le prolongement naturel de Paris vers la mer (...). Toute la Haute-Normandie peut s’investir sur un tel projet (...). La Basse-Normandie se situe dans son ensemble hors d’un tel schéma. Le grand projet, le voici, le dynamisme à venir se localise très fortement dans ce cadre privilégié. A la Basse-Normandie de jouer son destin autrement. Réponse : Oui, le projet Basse Seine Paris est un grand projet, incontournable d’une manière ou d’une autre mais à trois conditions :

-Ne pas marginaliser un peu plus la Basse-Normandie (ses élus l’ont bien compris)

-Inclure la rive gauche de la Seine en même temps que la rive droite, notamment au niveau de l’estuaire et du tripôle urbain Rouen/ Le Havre/ Caen.

-Créer une grande région de Normandie, faisant poids en contrepoint de la région parisienne plutôt qu’un nouveau satellite parisien dans la Basse Seine où même Rouen et Le Havre perdraient définitivement l’initiative et leur âme. Je considère cet argument comme décisif »




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