(Photo : Anonyme)
Notre approche n'est surtout pas celle du replis identitaire sur un passé certes prestigieux mais d'approcher la question régionale normande comme étant la variable géographique, territoriale sinon géopolitique du triste rapport de force social et économique entre dominants et dominés: aussi au terme de Normanité, nous préférons celui de NORMANDITUDE au même titre que la NEGRITUDE autrefois proposé par Césaire et Senghor (un Normand de coeur) pour dénoncer le mépris et la domination culturelle des Européens sur les peuples colonisés.
Enfin, nous faisons complètement nôtre cette citation de Michel Rocard (au bon vieux temps du PSU) qui avait titré anonymement un opuscule paru en 1966 au lendemain de la Guerre d'Algérie de la façon suivante:
"Il faut décoloniser la Province"
Nous considérons donc au collectif BEN que les citoyens qui militent en Normandie pour la transformation économique, sociale, institutionnelle ne peuvent plus ignorer cette question régionale normande: les territoires et les habitants, salariés du public, salariés du privé, jeunes, retraités, exploitants agricoles, commerçants, artisans et petits patrons, tous citoyens de ces territoires normands menacés par la relégation, le déclin, les délocalisations, la fermeture des services publics, ont besoin d'avoir ici une collectivité régionale à la hauteur des enjeux...
Cette question ce n'est pas qu'une question de "tambouille" électorale comme l'a dit récemment Alain LEVERN s'opposant ainsi à toute idée de fusion entre Haute et Basse Normandie (position qui nous déçoit beaucoup alors que son bilan au CRHN n'est pas mauvais...)
Ce n'est pas non plus qu'une question technique d'organiser clairement les compétences entre Etat, Région, Départements et intercommunalité avec les budgets qui vont avec, même si sur ce sujet il y a une vraie urgence et une vraie inquiétude aggravée par une gestion plus que brouillonne de l’agenda des réformes de la part de l’actuel chef de l’Etat (par ex: 64% des 622 millions du CRBN pour le budget 2009/2010 proviennent de dotations, en baisse, de l'Etat central... Et on parle désormais de supprimer la taxe professionnelle...).
C'est surtout et avant tout la question politique de savoir qui aura le courage et la volonté nécessaire pour qu'il y ait ici une vision d'avenir sinon un "désir d'avenir" à la hauteur du 6ème potentiel régional de France en part de PIB si les cinq départements normands étaient rassemblés dans une seule région administrative.
Le drame normand, c’est que depuis 38 ans il n’existe toujours pas de mandat politique normand qui aurait pu mettre la carrière publique d’un homme politique au service de la Normandie ou l’inverse...
La réunification de la Normandie n'est surtout pas un but en soi: elle est un préalable indispensable sinon absolu pour qu'un vrai projet régional puisse enfin exister. Regardez les méfaits permanents de cette absence de vision intégrée et globale de la Normandie! Sur tous les dossiers importants de l'aménagement du territoire du développement économique, nous sommes en difficulté, en train de nous battre contre le mépris de décisions prises finalement très loin d'ici car là est la principale conséquence de la division normande depuis 38 ans c'est que les décisions importantes concernant cette région sont toutes prises en dehors de la région.
Le dossier ferroviaire illustre jusqu'à la caricature cette relation de soumission: pour la SNCF, les lignes normandes ne desservent qu'une banlieue de la banlieue de Paris. Les deux CR normands se battent mais ne se battent pas ENSEMBLE... Une association d'élus est en cours de constitution mais jusqu'à la preuve du contraire, elle ne concernerait QUE la Basse Normandie! Comme d’habitude cela sera seulement à demi efficace !
Bref ! Le temps d'un vrai courage politique est arrivé sur cette question prise en otage depuis 1972 parce que des professionnels d’eux-mêmes nous promettent la réunification toujours après les élections...
Sauf que depuis 2004, cette question n'est plus qu'un simple serpent de mer.
C'est devenue une vraie question qui certes n'a pas fait l'élection régionale de 2004 mais qui l'a défaite pour R.Garrec farouche opposant à la « réunification» en demi-région bas normande. Depuis 2004, les deux CR normands, socialistes, multiplient avec succès les coopérations démontrant par la pratique ce que certaines élites politiques (à droite comme à gauche) s'étaient obstinées à démentir: Haute et Basse Normandie sont les composantes différentes d'un même ensemble cohérent...
Pas ou peu de concurrence mais énormément de complémentarité: les coopérations ont même contribué au rallumage du moteur économique normand, à savoir l'estuaire de la Seine entre Caen, Rouen et Le Havre (création d'une grande CCI de l'Estuaire de Honfleur à Fécamp et du Havre à Lisieux)
Curieusement, ceux qui s'échinent encore à nier cette évidence s'appellent aujourd’hui Alain LEVERN et... Jean-François LEGRAND (Rappelons que la réunification est typique de ces questions générales qui transcendent les clivages politiques : dans les combats d’arrière-garde, certains font ce qu’ils peuvent !).
Un rapport (Cabinet EDATER) rendu public en avril 2008 par Laurent Fabius nouveau président de l'agglo de Rouen et commandé par les deux présidents PS des deux CR normands (Levern et Duron) dit clairement qu'il y a bien plus d'avantages à fusionner qu'à rester divisés: certes la réunification ne sera pas simple (il s'agit de se réapproprier un espace régional commun: effacer 38 ans de mauvaises habitudes ne sera pas évident)
Nous resterons vigilants car la dénonciation des difficultés de la Réunification est d’ores et déjà le seul argument des élus (de gauche ou de droite) qui veulent garder leurs sièges par l'occultation systématique du BILAN CATASTROPHIQUE DE LA DIVISION.
Depuis 2008 et la victoire de la gauche aux municipales, les socialistes et leurs alliés sont aux commandes de presque toutes les grandes collectivités territoriales de Normandie: les deux CR (Beauvais qui est pour la réunification et Levern qui est contre), les deux départements Haut-normands, les agglos et villes de Caen et Rouen (Duron pour la réunif avec Caen comme capitale, Fourneyron pour la réunif avec Rouen comme capitale...Et Fabius président de l'agglo de Rouen qui lui se dit « ouvert » sur cette question tout restant encore très prudent sur la méthode...)
En outre, la droite en Haute Normandie est pour la Réunification depuis longtemps mais à des degrés divers : Rufenacht maire du Havre, s'est longtemps battu pour cette réunification dans les années 1980/1990 avant de se replier sur Le Havre, un peu écoeuré par les manoeuvres de d'Ornano et de Lecanuet.